Délais de grâce devant le Juge de l’exécution
Qu’il s’agisse d’un bail d’habitation ou d’un bail commercial, le locataire, en raison d’une défaillance de sa part s’est vu signifier un commandement de quitter les lieux par huissier.
Le locataire a toutefois la possibilité de saisir le juge d’exécution pour obtenir un délai de grâce.
L’huissier a délivré un commandement de quitter les lieux au locataire
C’est une condition préalable à toute demande de délai de grâce.
L’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose que « si l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7 ».
Un délai de deux mois doit s’écouler entre cette remise par l’huissier et l’expulsion effective du locataire.
Le locataire peur saisir le juge d’exécution
Pendant que court ce délai de deux mois, il est possible pour le locataire de saisir le juge d’exécution dans le but d’obtenir un délai de grâce.
Dans ce cadre, l’article L.412-3 de ce même code stipule que « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation ».
Pour que ce délai soit accordé, il est donc nécessaire que le locataire n’ait pas pu être relogé dans des conditions normales, c’est-à-dire dans un logement correspondant à la situation du locataire.
Cette demande suspend la procédure d’expulsion.
Qui peut demander le délai de grâce ?
L’article L. 412-3 du code de procédures civiles d’exécution stipule que sont concernés par cette procédure les occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel.
Toutefois, les articles L. 412-7 et L. 412-8 de ce même code excluent de cette procédure :
- les occupants de logements étudiants lorsqu’ils ne remplissent plus les conditions pour lesquelles le logement a été mis à leur disposition,
- les conjoints violents, dans le cadre d’une procédure de divorce et vis-à-vis desquels le juge aux affaires familiales a ordonné l’expulsion.
Enfin, la demande ne peut être recevable si le propriétaire souhaite reprendre le logement pour lui-même ou un membre de sa famille, selon les dispositions de l’article L. 412-3.
Quels sont les délais accordés ?
Selon l’article L. 412-4 du code des procédures civiles d’exécution, le juge peut accorder un délai de grâce pouvant aller de 3 mois à 3 ans.
En effet, il est stipulé que « la durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. »
Mais ce délai, même s’il est laissé à l’appréciation du juge, se basera sur des éléments tels que la bonne foi du locataire, c’est-à-dire le comportement qu’il aura eu depuis le début de la procédure engagée à son encontre par le propriétaire.
Ce même article dispose en outre que « pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés. »
Notons enfin que le délai accordé par le juge se rajoute aux périodes de trêves hivernales débutant le 1er novembre de chaque année, et se terminant le 31 mars suivant. En effet, il est impossible d’expulser le locataire d’un bail d’habitation pendant cette période.
Quel recours pour le propriétaire ?
Comme il est indiqué dans l’article L. 412-4 du code de procédures civiles d’exécution, le juge tient compte « des situations respectives du propriétaire et de l’occupant ».
Cela signifie qu’effectivement la situation du locataire est prise en compte, mais également celle du propriétaire.
Le propriétaire pourra donc s’opposer à l’octroi d’un délai de grâce.
Dans ce cadre, il sera indispensable d’être accompagné par un avocat qui saura mettre en avant les bons arguments pour éviter que le juge n’accorde ce délai de grâce au locataire.
Ces arguments se baseront sur différents éléments concernant le propriétaire :
- son âge,
- son état de santé,
- sa situation familiale,
- sa situation financière…
Tous ces éléments seront appuyés par des éléments précis et circonstanciés, afin de convaincre le juge de statuer en faveur du propriétaire.